Le blog d'Esprit Livre

" Vous trouverez sur ce blog des informations sur les métiers de l'écriture, des chroniques littéraires , des textes de nos auteurs en formation, des guides et des conseils pour vous former, écrire et publier. " Jocelyne Barbas, écrivain, formatrice, fondatrice de L'esprit livre.

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Le monde hors des livres

Sommaire

Il existe un monde hors des livres. Je ne parle pas de la vie réelle, pas vraiment du moins. Plutôt de tout ce qui peut entourer l’histoire que l’on lit. Il peut s’agir d’une célébrité dont l’auteur s’est inspiré pour donner vie à l’un de ses personnages. D’un événement ayant nourri la genèse de son intrigue. Ou éventuellement d’une œuvre ou du travail d’un artiste entrant en résonance avec l’univers que l’écrivain dépeint. Un sentier serpentant un peu à l’écart des pages, où l’odeur de l’encre s’atténue, mais qui peut se révéler intéressant à condition de se montrer un brin curieux…

Les couleurs de la ville

Gone, Baby, Gone

« West Beckett ressemblait à un tableau de Rockwell au cœur des Berkshires. Des clochers blancs encadraient la ville elle-même tels des serre-livres, et la rue principale était bordée de boutiques d’antiquités et de décoration donnant sur des promenades en planches. La bourgade se nichait au fond d’une petite vallée comme une fragile porcelaine au creux de la paume, encerclée de tous côtés par des collines vert foncé parsemées de plaques de neige évoquant des nuages. »

Gone, Baby, Gone – Dennis Lehane – pages 532/533 – Éditions Rivages/Noir.

Les métaphores enchâssées

Je trouve cette description particulièrement réussie. D’une écriture fluide en rendant la lecture agréable, elle s’appuie sur des images composant une palette visuelle grâce à laquelle l’esprit du lecteur peint son propre décor. « Des clochers blancs […] tels des serre-livres » m’évoque un somptueux diorama. La fragile porcelaine dit un monde de figurines. Le tour de force opéré par Lehane est de ne pas s’être laissé déborder par ses métaphores. Il les a enchâssées dès le début de son paragraphe dans une référence à Norman Rockwell, l’œuvre de l’artiste lui servant en quelque sorte de cadre et de point de départ.

La description à l’huile

Cette tonalité descriptive impacte les éléments du paysage qu’elle annonce et détaille. Pour qui furète un peu en dehors des lignes afin d’avoir une vision claire d’un West Beckett tout droit sorti des tubes de peinture à l’huile de Rockwell, les toiles de ce dernier, visibles entre autres sur internet, fourniront une bonne indication de ce que Lehane souhaite exprimer en s’y référant. Ce n’est certes pas indispensable pour qu’on imagine dans quel décor se situe son action, mais ça vaut le coup d’œil, pour ne pas dire le détour.

Les artistes associés

Une étoile dans une botte de foin

De même qu’à travers le prisme rockwellien les mots de Lehane prennent ici une teinte particulière, des écrivains convoquent en leurs pages d’autres peintres en fonction de la coloration spécifique qu’ils désirent voir associée à leurs descriptions. Soit qu’ils englobent leur style en son entier ou citent une de leurs toiles en particulier. Ainsi un ciel d’une beauté tourmentée sera-t-il comparé à La nuit étoilée de Van Gogh, ou la traversée d’un champ renverra-t-elle à Botte de foin sur les rives de Loing d’Alfred Sisley. J’en passe et des Hopper.

À côté de l’histoire

La littérature est assez friande de ces associations ne se limitant d’ailleurs pas qu’aux ramifications picturales. Mais pour ce qui est de Gone, Baby, Gone, peut-être est-ce le tableau Stockbridge Main Street at Christmas qui a inspiré à Lehane la description qu’il fait de West Beckett. Rien n’est moins sûr ; je veux dire, je n’ai pas de preuves ; mais pourquoi pas, après tout ? Oui, je suis ce genre de lecteur qui parfois se met à imaginer une histoire à côté de celle qu’on lui raconte. Non pas parce que le livre ne me suffit pas, mais parce qu’il m’offre l’occasion de m’enrichir davantage.

La fiction dévorée

Stockbridge, je l’ai appris en me documentant sur les paysages exécutés par Rockwell, est la petite ville où ce peintre génial a vécu et travaillé durant un quart de siècle jusqu’à sa mort. Cela pourrait n’être qu’anecdotique si le tableau qu’il en a fait n’avait pas connu une de ces destinées montrant combien la réalité est capable de dévorer la fiction après avoir nourri la littérature. Que se passe-t-il donc, dans cette paisible bourgade ? Rien de moins, chaque année, qu’un voyage dans le temps…

La rue principale de Stockbridge à Noël | Un chez-soi pour les fêtes

Hors du temps à Stockbridge

Jumelage temporel

Pour qui est citoyen américain, nul doute que Stockbridge, dans le Massachussetts, ne soit donc un lieu de rendez-vous connu et très apprécié. Natif de Boston, il serait fort étonnant que Lehane n’y ait jamais mis les pieds, notamment lors de cet événement très spécial voyant à l’approche des fêtes de Noël s’opérer une reconstitution grandeur nature du tableau Stockbridge Main Street at Christmas. C’est pourquoi j’avance l’hypothèse peut-être pas si farfelue que ça d’un « jumelage temporel » entre West Beckett et Stockbridge.

La réalité hors de son cadre

Au lecteur curieux et inventif, rêvassant sur le chemin l’ayant mené de West Beckett à Stockbridge, l’idée pourrait venir d’écrire l’histoire de cette ville devenue un tableau. De cette scène du passé reconstruite chaque année. De cette lumière nostalgique se reflétant sur les chromes d’une Oldsmobile. D’une machine à remonter le temps entreposée sous une couverture poussiéreuse dans une remise de main street. Il y a tant de choses à décrire et à raconter quand la réalité sort de son cadre.

L’écrivain hors des clous

Si le hasard vous mène un jour dans ce petit coin de la Nouvelle-Angleterre, vous pourrez emprunter la rue principale de Stockbridge, non loin des monts Berkshire. Avec un peu de chance, vous roulerez doucement derrière une Mercury rouge cerise à la suite de laquelle vous pénétrerez dans l’Amérique idéalisée vue par Norman Rockwell. Je vous recommande vraiment d’avancer à faible allure : on ne sait jamais, Dennis Lehane pourrait bien traverser hors des clous comme j’aime à me promener hors des livres…

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