Le blog d'Esprit Livre

" Vous trouverez sur ce blog des informations sur les métiers de l'écriture, des chroniques littéraires , des textes de nos auteurs en formation, des guides et des conseils pour vous former, écrire et publier. " Jocelyne Barbas, écrivain, formatrice, fondatrice de L'esprit livre.

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Surmonter la page blanche grâce à l’IA : conseils et exercices pour les écrivains débutants

Sommaire

On est parfois désemparé en s’abîmant dans une réflexion infertile devant une page blanche. Le blocage entraîné par ce flottement intellectuel est parfois vécu comme un échec et pousse de nombreux auteurs débutants à remettre en cause leur capacité à écrire. Or, avec un peu d’expérience, on prend conscience que ce coup d’arrêt passager intègre notre processus créatif. Nous allons voir comment, sans se substituer à l’écrivain, l’IA peut l’aider à réamorcer la mise en mouvement de son imagination… 

Mises en bouche

Rien n’est plus effrayant – ni plus excitant – qu’une page blanche. Effrayant parce que vous y cheminez seul, imprimant vos empreintes sombres sur cette plaine immaculée ; et excitant parce que personne ne connaît votre destination. Même vous, vous ne sauriez dire avec précision où s’arrêtera votre voyage. »

Zephyr, Alabama, page 245 – Robert McCammon – Éditions Monsieur Toussaint Louverture.

«On peut toujours retravailler une mauvaise page. Mais on ne peut pas retravailler une page blanche.»

Jodi Picoult

«Les amateurs s’assoient et attendent l’inspiration, les autres se lèvent et se mettent au travail.»

Stephen King

Les coups de pouce de l’IA

Une page blanche est une étape, pas un échec. Notre pensée ne s’interrompt jamais, pas plus que notre imagination ne se tarit d’un coup. Pourtant, aussi irrationnelle soit-elle, la crainte que cela arrive peut devenir une croyance inhibant notre créativité. C’est précisément à cet instant que notre esprit se braque, car nous nous sommes autopersuadés qu’il n’était plus en mesure de faire le job. Afin de le « reprogrammer » de façon positive, rien de tel qu’un p’tit coup de pouce de l’IA pour le stimuler…

Le bout de tissu

Ainsi, l’IA est à même de générer des amorces susceptibles de réenclencher une idée latente ou de fournir une axe de développement qui nous échappait. Bref, de remettre notre moteur/cerveau en état de marche. Un début de phrase peut suffire, comme un bout de tissu qu’on donnerait à un chien pour retrouver la trace de ce qu’on devine être à portée de main sans tout à fait le discerner. C’est une traque qui, après avoir été brièvement interrompue, reprend de plus belle. 

L’inventivité oxygénée

Quelle que soit la proposition de l’IA, on s’en servira de point d’appui pour redonner du souffle à notre réflexion. Quand notre esprit s’acharne en vain sur une solution unique, une piste alternative est toujours la bienvenue. Plus on dispose de « portes » s’ouvrant dans notre récit, plus nos perspectives narratives s’élargissent. C’est une bouffée d’air frais indispensable pour des idées qui souffraient jusque-là d’une inventivité en manque d’oxygène. 

Les remparts mentaux

Si l’IA n’est pas la technologie la plus farceuse au monde, du moins est-elle à même de nous soumettre une approche amusante de nos difficultés. Dédramatiser ce qui nous fait barrage, c’est déjà faire jouer le blocage sur ses gonds. On dit qu’il n’existe pas de forteresse imprenable, mais de forteresse mal attaquée, aussi doit-on étudier tous les stratagèmes permettant de se faufiler entre les remparts mentaux nous défendant l’accès à la créativité. L’IA saura nous suggérer des contraintes ludiques semblables à celles qu’on propose en atelier d’écriture pour crocheter les serrures de notre esprit.

De la théorie à la Saint-Patrick

Alors, on n’attend pas Patrick ?

Pour passer de la théorie à la pratique, j’ai posé la question suivante à une IA : « Propose-moi 3 façons de débuter une histoire se déroulant durant la fête de la Saint-Patrick. » Et j’ai attendu. Pas longtemps. C’est une demande à la fois vague et spécifique, soit peu ou prou la définition de l’état d’esprit d’un auteur qui s’échine sur un texte dont le sujet est clairement identifié sans qu’il sache pour autant par quel bout le prendre. Voici le résultat selon les biais choisis par l’IA, avec ses propres titres :

Par l’effervescence de la rue

« Dans les rues tapissées de guirlandes vertes et d’éclats de rires, la procession s’élançait, entre cornemuses et danseurs, emmenant toute la ville dans une effervescence irlandaise. Sous un ciel que le printemps n’avait pas encore réchauffé, chacun guettait le passage du Leprechaun légendaire promis par la tradition populaire. » 

Par un réveil singulier

« Ce matin-là, Liam ouvrit les yeux sur un monde transformé : même la rivière semblait couler en vert devant sa fenêtre, et partout on cherchait des trèfles à quatre feuilles tandis que les premiers accords d’un air celtique montaient de la rue, annonçant une journée extraordinaire. »

Par une transmission familiale ou une légende

« Le grand-père de Siobhan aimait à raconter qu’en ce jour, chaque Irlandais portait le souvenir d’un trésor caché ; car la Saint-Patrick, plus qu’une fête, était le temps où les histoires anciennes prenaient vie au coin du feu, réveillant l’espoir que, peut-être, on croiserait un Leprechaun malicieux prêt à livrer ses secrets. »

Voici l’introduction d’une histoire que ces extraits m’ont inspiré :  

« La Saint-Patrick est plus qu’une fête. C’est le jour où d’anciennes histoires crépitent à chaque coin de feu de chaque coin de bouquin de chaque coin de chaumière de chaque coin de lande de chaque coin d’Irlande. On y murmure la tragédie d’un leprechaun mort complètement soul étouffé dans sa vomissure verte. On y raconte d’une voix éraillée le terrible naufrage de l’Invincible Armada sur les côtes ouest du pays, parsemant l’océan de vaisseaux fracassés du Comté de Kerry au Comté de Galway. 

Mais l’histoire que je voulais vous narrer n’a pas encore été écrite – le sera-t-elle jamais ? Alors que je marche rapidement sous un ciel d’orage frappant ses tambours funèbres au dessus des étendues celtiques, j’en doute de plus en plus. Car à mesure que j’avance entre les murets en pierre sèche que le vent agace de chuchotis sourds, je comprends avec effroi – en entendant qu’on rampe à une vitesse folle derrière moi – que je n’en rédigerai peut-être pas même la première ligne. »

D’autres leviers

Pour être complet sur l’aide proposée par l’IA, je me dois de mentionner deux autres exercices. Ils ne m’ont pas été utiles dans le cadre de cet article, mais il est bon d’en prendre connaissance pour comprendre les leviers sur lesquels elle indique de peser pour vaincre la page blanche :

Exercice 2 – Scénarios divergents

Tu bloques sur la suite de ton histoire ? Écris la situation de départ et demande :

“Donne-moi trois directions possibles pour la suite : mon héros découvre une lettre anonyme dans sa boîte aux lettres.” 

L’IA propose différentes options (intrigue policière, drame intime, comédie absurde).
L’auteur sélectionne la piste qui l’inspire et développe son propre fil narratif.

Exercice 3 – Contraintes ludiques

Transforme la page blanche en défi :

“Donne-moi une contrainte d’écriture originale pour relancer mon texte.”

Exemple : écrire une scène sans adjectifs, raconter un dialogue sans verbes de parole, ou adopter le point de vue d’un animal.

Ces contraintes libèrent l’écriture en déplaçant l’attention vers le jeu, plutôt que vers la peur de “bien faire”. 

Comment j’ai bossé avec l’IA pour écrire mon texte

Une anaphore à l’Herbe de fer

Pour donner un peu de « cachet » à l’ensemble, je me suis fendu d’une figure de style, une anaphore associée à une gradation. Pour l’anecdote, J’avais vu William Kennedy en employer une dans L’Herbe de fer : « Helen est la personne polie avec infiniment de soin qui se trouve au bout du lit du bout de la chambre du bout de l’hôtel du bout de la ville du bout du monde. » Ça m’avait beaucoup plu. Je l’avais donc notée en me disant que ça pourrait m’être utile. En passant, je vous le rappelle, n’oubliez pas de relever ce genre de chose, car un jour ou l’autre ça refait surface à point nommé.

Naufrage et mariage

Ensuite, je me suis appuyé sur une figure du folklore irlandais, un leprechaun que, allez savoir pourquoi, j’ai décidé de faire mourir dans son vomi, sans cœur que je suis. Puis j’ai recouru à un événement historique de ce pays pour nourrir l’idée de récits qu’on raconte au coin du feu. J’ai préféré un naufrage à un mariage, car j’aime les histoires qui se finissent bien : il arrive qu’il y ait des survivants lors d’un naufrage, n’est-ce pas. Enfin, je me suis servi de ces ancrages pour mettre en scène mon propre personnage ayant lui-même quelque chose à raconter – si jamais ce qui rampe derrière lui ne le rattrape pas…

Le côté authentique de l’artificiel

Pour peaufiner l’ensemble, j’ai sollicité les algorithmes de l’IA afin de connaître les naufrages célèbres survenus dans l’océan Atlantique bordant les côtes d’Irlande (elle m’a fourni 3 catastrophes principales de ce type), ainsi que pour obtenir des indications géographiques (les Comtés de Kerry et de Galway). Je me suis également renseigné auprès de l’IA pour connaître la technique de construction des murets typiques dessinant les campagnes irlandaises. On le voit, en plus d’obtenir un matériau de base susceptible d’alimenter mon imaginaire, j’en ai profité pour donner de la précision à mon texte, ce qui est toujours mieux que de raconter n’importe quoi.

La place de l’écrivain par rapport à l’IA

Le chef d’orchestre

Si l’IA m’a mis une petite musique celtique dans la tête pour y faire danser mes idées, c’est bien moi qui suis demeuré le chef d’orchestre de mon texte de la première à la dernière note. La figure de style vient de mon vécu littéraire. Le sort réservé au leprechaun est une facétie de mon cru. Le choix d’évoquer un naufrage ne provient pas d’un algorithme mais d’un recoin de mon esprit. Ce qui rampe aux trousses de mon personnage – et je préfère ne pas savoir ce que c’est – est né de mon goût pour les choses inquiétantes qu’on trouve dans les livres de Dean Koontz ou Stephen King, par exemple. 

C’est elle qui le dit

Quelqu’un a dit avec justesse : « L’IA peut débloquer une situation, mais l’élan créatif doit rester personnel. S’en remettre à elle pour chaque phrase risque d’étouffer sa propre voix d’auteur. Les propositions générées par l’IA sont des brouillons : elles donnent une matière première, mais c’est à l’écrivain de modeler, couper, réécrire pour que le style devienne vraiment sien. » Au fait, l’auteur de ce passage n’est autre que… l’IA.

À tout prix

Au final, je crois que ce qu’il faut retenir de ce test est que, seul maître à bord, j’ai été correctement secondé par une machine. Elle m’a permis de fixer ma pensée sur des extraits mettant un peu d’huile dans mes rouages créatifs. Elle s’est par ailleurs consciencieusement acquittée des travaux de recherche que je lui demandais. Il me revenait de rebondir sur ses trois « suggestions irlandaises » pour élaborer des phrases imprégnées de ma personnalité d’auteur. En gardant à l’esprit qu’il faut la conserver à tout prix.

Se démarquer des insipides

C’est, il me semble, la façon la plus formatrice – et la plus honnête intellectuellement – d’utiliser l’IA pour lever un blocage tout en conservant notre propre identité littéraire. Alors n’hésitez pas à lui demander un coup de main de temps en temps. Mais continuez à cultiver votre originalité et à penser par vous-même. Ça reste le moyen le plus sûr de se démarquer d’écrits insipides « d’auteurs » ayant cédé à la facilité des textes clés en main. C’est dit !

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