Le blog d'Esprit Livre

" Vous trouverez sur ce blog des informations sur les métiers de l'écriture, des chroniques littéraires , des textes de nos auteurs en formation, des guides et des conseils pour vous former, écrire et publier. " Jocelyne Barbas, écrivain, formatrice, fondatrice de L'esprit livre.

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Pourquoi aime-t-on lire une histoire d’horreur ?

Sommaire

L’histoire d’horreur fascine : son sens symbolique s’adresse à nos peurs viscérales, régule nos pulsions, nous aide à conserver notre équilibre et notre humanité.

Stephen King dit que « Les montres poussent l’humanité dans ses retranchements pour révéler les dysfonctionnements de notre société avec la férocité de s’en réjouir «  et ainsi  l’horreur est un « mal nécessaire ». Et quand King parle de ce qu’il connaît peut-être le mieux, j’ai une forte tendance à le croire. Oui, mille fois oui, l’horreur nous est en quelque sorte indispensable. Dans les lignes qui viennent, on verra pourquoi la littérature a besoin d’avoir peur…

Effroi et grimaces

Malaise et gouttes de sang

L’horreur est protéiforme. Ce n’est pas systématiquement la peine de faire jaillir de la tripaille pour la susciter. Beaucoup de choses sont à même de nous plonger dans le plus total effroi sans qu’il faille recourir à des effets sanguinolents. La mort d’un enfant est horrible, par exemple ; qu’il s’éteigne doucement dans son sommeil ou soit percuté de plein fouet par un chauffard ivre, au bout du compte, la peine demeure intolérable, quels que soient les accents marquant le drame. Certes, les images qui nous restent en tête selon l’une ou l’autre situation ne seront pas les mêmes. Certaines étant plus dures à « accepter » que d’autres.

Une image vaut mille maux

S’il y a bien quelque chose faisant appel aux images, l’horreur arrive probablement première de sa classe. Certains auteurs la gâchent parfois dans des effets faciles, quand d’autres la sublime en la suggérant, voire en l’intellectualisant. Quand l’espace d’un millième de seconde on se détourne d’une page en grimaçant suite à ce qu’on vient de lire, l’auteur a réussi son pari. Réussirez-vous le vôtre ? Si j’aimais qu’un seul conseil vous soit profitable une fois cet article lu, ce serait celui-ci : écrivez une page d’horreur pure, sans aucun tabou. Même si c’est pénible parce que c’est jouissif. Même si c’est jouissif parce que c’est pénible.

King, what else ?

Pour un peu parler de moi, ce qui n’est pas le plus désagréable des sujets, j’ai très peu officié dans le registre horrifique. Mais quand je m’y suis mis, je n’ai pas fait dans la demi-mesure, et c’est ce vers quoi j’aimerais que vous alliez si jamais ce genre vous tente un de ces prochains jours. Il se trouve qu’après avoir terminé la lecture de Knockemstiff (1), le recueil de nouvelles de l’excellent Donald Ray Pollock, je me suis plongé avec le même ravissement dans le dernier King en date, Si ça saigne (2) : j’en suis environ à la soixante-dixième page de la première nouvelle, et si aucune goutte de sang n’a pour l’instant été versée (ou presque), l’horreur rôde bien entre les lignes. Quelque part.

Le bonheur dans une flaque de sang

L’horreur est un contraste

Je m’attends à un coup de massue qui fera gicler la chute, le désormais vieillissant bonhomme du Maine m’ayant habitué à ça. Dire que l’âge n’a pas prise sur lui est un euphémisme, s’agissant de nous foutre la trouille. Ce que je trouve remarquable chez lui, entre autres nombreux talents, c’est sa facilité à rendre les choses sans importance des plus intéressantes, pour mieux nous asséner une scène d’horreur qui s’imposera comme un contraste redoutable. Car c’est aussi ça, l’horreur, un contraste terrifiant par rapport aux habitudes qu’elle dérange. Songez à ça en écrivant un passage qui convoque toutes les déviances ; le contraste, c’est de l’artillerie lourde. Pensez fleurs et papillons, puis aspergez tout ça de sang frais à gouttes épaisses. Pensez aussi à la grimace du lecteur, la meilleure des récompenses virtuelles.

Ketchum est mort mais on ne l’enterrera pas de sitôt

Parlant de King, je me dois de relayer sa parole quand il a parlé de Jack Ketchum comme étant un des derniers pistoleros. Ce fabuleux écrivain nous a quittés il y a trois ans. J’ai déjà dû vous dire une bonne dizaine de fois de ne pas lire Une fille comme les autres (3), tout en vous encourageant à vous ruer dessus. Ce bouquin, c’est quelque chose, dans le genre malsain. On en conserve une trace, voyez-vous ? Lisez-le et ne le lisez pas, faites comme bon vous semble. J’ai rarement vécu une pareille expérience de lecture. Tenez, je viens de remettre la main dessus, et voici ce qu’on peut lire en quatrième de couverture :

« Ketchum est devenu une sorte de héros pour nous qui écrivons des récits de terreur et de suspense. Il est tout simplement le meilleur […] Une fille comme les autres est un livre animé d’une vie propre. Il ne se borne pas à promettre la terreur, il tient ses promesses. On ne peut pas s’arrêter de le lire. »

Stephen King

« Voilà l’essentiel, l’horreur encastrée dans la littérature authentique, une plongée dans la noirceur absolue, la face cachée de la tradition littéraire américaine. »

Edward Bryant

Si ça ne vous donne pas envie de le lire/ne pas le lire, je ne peux rien faire pour vous !

L’horreur physique

Logiquement, ce qui atteint notre corps est de nature à nous horrifier. Quand un auteur nous dépeint un pauvre gars se faire trancher le sexe à la scie à métaux (quelqu’un a vraiment écrit ça ? Qu’il se dénonce !), ça fait froid dans le dos, et pas que. L’image, on y revient, est à ce point choquante qu’elle prend immédiatement forme dans notre esprit pour ne le quitter que quelques chapitres plus loin, voire à l’horizon davantage éloigné d’autres bouquins plus paisibles. L’horreur prend ses racines dans nos pires craintes, mes lecteurs mâles auront un avis circoncis sur ça. Circonscrit, pardon.

L’horreur psychologique

Vous êtes tranquillement installé dans votre canapé, aimablement occupé à lire La classe de neige (4), d’Emmanuel Carrère. Et là, tout tranquille que vous soyez, vous sentez poindre un sacré malaise. Quelque chose cloche fortement dans l’histoire qu’on vous raconte. Une horreur qu’on met du temps à nommer sourde entre les lignes. Carrère n’en était qu’à son coup d’essai, qui nous gratifierait quelques années plus tard d’un L’adversaire admirable de tension. Il touchera là nos angoisses les plus terribles, celles régissant la vie d’un homme qui a fondé son existence sur une supercherie, ce qui le mènera à prendre des décisions propres à nous retourner l’âme. L’horreur, c’est aussi le quotidien d’un type qui a failli en tout, et dont les échecs ne peuvent être effacés que par la disparition de ceux qui les constatent. Un livre d’une sobriété glaçante.

De la trompette au sac à vomi

Faut qu’ça saigne !

Boris Vian aurait sûrement été un très bon auteur de récits horrifiques si sa trompette ne l’avait pas tant accaparé ! Il s’est inscrit d’autres façons dans la littérature française, avec grand talent. À lire et à relire. Réécoutez aussi « Les joyeux bouchers » à l’occasion, c’est de l’or en barre (Bach). Cela dit, si nous refaisions un petit détour par Ketchum ? Le bougre s’est illustré dans la défunte collection Fleuve Noir Horreur – elle aura tenu quatorze ans, tout de même –, avec ce titre à se demander s’il n’y a plus de saisons : Saison de mort. Là, je ne vous cache pas qu’on va droit à l’équarrissage.

Une éprouvante mise en quarantaine

Même si c’est très loin d’être mon titre préféré de cet auteur, je conseille Saison de mort pour ses outrances « gorissimes ». Il vaut le coup d’œil si l’on souhaite se familiariser avec ce type de littérature. Rien ne vous sera épargné question violence, jusqu’à des scènes franchement dégueulasses. La seule couverture vaut son sac à vomi, vous voyez le truc ? Bref, à destiner à un public averti, mais ce bouquin n’est pas dénué de qualités littéraires, aussi trash soit-il. C’est ce qu’on pourrait qualifier d’ouvrage de jeunesse, puisque Ketchum était sous la quarantaine – c’est de saison ! – quand il l’a écrit.

Stephen qui ?

L’horreur est un pan de la littérature qui se respecte. Si tous les trains fantômes ne sont pas effrayants, certains parviennent à nous faire frissonner à la sortie d’un virage sec, dans l’obscurité d’un tunnel, quand surgit un figurant dans son costard de squelette. Ah, avant de vous quitter, je vais remettre un peu de frayeur dans le wagon : Joyland. Ce n’est pas une histoire d’horreur. Mais ça se passe dans un parc d’attractions, le roman idéal pour que la fin de mon article trouve de la cohérence. L’auteur ? C’est ce gars du Maine dont je ne cesse de vous rebattre les oreilles. Vous pouvez y aller les yeux fermés. Quand vous les rouvrirez, qui sait ce qui apparaîtra dans votre champ de vision…

Références citées dans cet article

  • Knockemstiff, Donald Ray Pollock, Éditions Libretto.
  • Si ça saigne, Stephen King, Éditions Albin Michel.
  • Une fille comme les autres, Jack Ketchum, Éditions Bragelonne.
  • La classe de neige, Emmanuel Carrère, Éditions P.O.L.
  • Joyland, Stephen King, Éditions Albin Michel.

Envie de vous essayer à l’écriture horrifique ?

Comment rédiger une nouvelle fantastique ? Réalisez cet exercice pour apprendre.

Donnez une dimension surnaturelle et inexplicable à vos récits afin d’effrayer vos lecteurs pour leur plus grand plaisir.

Lorsque vous écrivez, vous devez passer de l’autre côté de la barrière, prendre la place de votre lecteur et conserver votre vigilance pour percevoir les mécanismes de cette fascination, les techniques utilisées. C’est difficile, car tout est fait pour vous embarquer dans l’histoire, vous faire vivre une aventure.

Si vous restez « fasciné », vous restez passif. Vous ne voyez pas quels procédés ont été utilisés pour créer vos ressentis. Les auteurs nous aveuglent. Au début de cette prise de conscience, il est impossible de voir de soi-même les techniques. Il est nécessaire qu’une personne vous les montre et vous explique leur fonctionnement.
Les auteurs à succès ont compris ce phénomène. Ils savent ce que recherchent leurs lecteurs. Ils veulent un sens à leurs histoires, l’impression de l’avoir vécu, d’avoir éprouvé des sensations et des émotions, d’être familier avec les personnages et leurs environnements. Ils savent que la lecture comme l’écriture restent des expériences existentielles. Ces auteurs à succès utilisent ce secret. L’une des premières émotions fortes qui nous viennent de l’enfance est la peur.
Ce type de récit correspond au genre « fantastique ». Il obéit à des règles précises. Afin de vous les faire découvrir, cet exercice d’écriture vous explique comment vous y prendre. Vous allez vous amuser à coller une frousse bleue à vos lecteurs…

Cet exercice contient :

  • Une consigne d’écriture qui vous explique comment vous y prendre à chaque étape
  • Des conseils d’auteur : Stephen King, Dino Buzzati, H.G Wells
  • Des extraits choisis : Anne Rice, Richard Matheson
  • Et une bibliographie.

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