Le blog d'Esprit Livre

" Vous trouverez sur ce blog des informations sur les métiers de l'écriture, des chroniques littéraires , des textes de nos auteurs en formation, des guides et des conseils pour vous former, écrire et publier. " Jocelyne Barbas, écrivain, formatrice, fondatrice de L'esprit livre.

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Écrire sur son vécu 3

Sommaire

Troisième partie

Le fait marquant que vous souhaitez approfondir est clairement défini ; vous l’avez contextualisé et êtes parvenu à trouver un angle pour l’évoquer avec originalité. En tant que pivot du récit, vous avez adopté le point de vue du narrateur interne : fermement accroché au « je », vous êtes prêt à dévider les pensées nourrissant votre récit. Tout cela constitue un solide travail préparatoire, cependant ce ne sont là que les fondations de ce qu’il vous reste à accomplir : réassembler, pour les organiser, les fragments épars de votre mémoire…

Chaos mental et sens global

Ma vie dans un calendrier

Quand on effectue les recherches nécessaires à la mise en route d’une autobiographie, un constat s’impose rapidement : c’est un peu plus bordélique que ce à quoi on s’attendait. Notre existence n’ayant pas été consignée jour après l’autre sur les pages d’un calendrier – ou alors faites-moi signe si tel est le cas, vous êtes une rareté – il revient à chacun d’ordonner ses souvenirs. Croyez-moi, les gens qui parcourront votre livre apprécieront grandement que vous le fassiez…

Vaincre le chaos mental

Afin d’éviter à ceux nous lisant d’errer dans les méandres de notre passé, il faut considérer la mémoire comme un chaos mental dans lequel l’écrit doit remettre de l’ordre. Une autobiographie, c’est parler de soi en s’adressant aux autres. Cet exercice funambulesque exige d’emblée la prise en compte de l’ignorance que la majorité des lecteurs a de notre vie, aussi passionnante soit-elle. Une approche chronologique de ce qu’on a décidé de raconter est donc souvent privilégiée. La précision des contours temporels détermine la netteté du propos.

Le sens global des fragments

Pour autant, on ne doit surtout pas s’en tenir à une succession de faits et de dates. Il existe bien sûr une littérature résolument fragmentaire, voire parcellaire, mais nous n’avons pas tous le talent du René Char de Feuillets d’Hypnos ou du Henri Calet de Peau d’ours pour nous y risquer avec le même bonheur. Là où d’autres s’égarent dans des écrits disparates, eux donnent un sens global à des morceaux textuels qui sans être mariés sont faits l’un pour l’autre.

Dans la broussaille du style

À la guerre avec René Char

Dans cette sorte de journal de résistance littéraire qu’est Feuillets d’Hypnos, une écriture en clair-obscur saisit des instants de vie – précaire – sur le vif. Ces bouts d’urgence arrachés à la guerre, la poésie fulgurante de Char les rend admirables :

Fragment 62

« Notre héritage n’est précédé d’aucun testament. »

Fragment 65

« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil. »

Fragment 81

« L’acquiescement éclaire le visage. Le refus lui donne la beauté. »

Fragment 138 :

« Il est tombé comme s’il ne distinguait pas ses bourreaux et si léger, il m’a semblé, que le moindre souffle de vent eût dû le soulever de terre. » 

Au troquet avec Henri Calet

« Me suivant à la trace sur le théâtre de mes exploits, je suis à la fois mon héros et mon historien », disait Calet. Cette scène de bistrot croquée par l’auteur, entassée parmi d’autres dans les coulisses de son œuvre,  s’insère dans n’importe quelle temporalité, créant la sienne propre. Un moment d’existence qui dure pour remonter, intact, jusqu’au lecteur :

« 21 août : Lassauts. Café.

Le patron, seul, un veuf ? Vêtu de noir – gilet, grosse moustache – fume beaucoup (cigarettes roulées).

Quatre tables. De temps en temps, il donne un petit coup de chiffon sur un angle  de table.

Un crucifix. Un phonographe : un petit coin pour la gaieté.

L’accueil froid du patron, puis plus aimable… pas trop.

Il se place à la porte et regarde du côté droit : une fille passe – un grognement. »

L’accueil d’une plume anonyme

Sans dire que nous ne sommes pas tous égaux devant l’autobiographie, il va de soi qu’un tel style, bien sûr remarquable, n’obtiendrait peut-être pas forcément l’accueil qu’il mériterait s’il était issu d’une plume relativement anonyme. Char, Calet et bien d’autres, ont beaucoup écrit par ailleurs pour qu’un intérêt spontané s’attache à leur travail même lorsqu’ils empruntent des sentiers moins explorés de la littérature, défrichant avec brio la broussaille stylistique des bas-côtés. À propos de s’aventurer hors d’un chemin littéraire clairement tracé, j’en termine là avec cette digression pour reprendre cet article où je l’avais laissé…

Échardes et écorce

La chair des faits

La chronologie des événements, donc. Son premier avantage est de conférer une structure naturelle à votre récit. Elle ne fait pas office de plan à strictement parler, mais du moins constitue-t-elle une robuste ossature prête à être recouverte de la chair des faits notables. Elle participe par ailleurs d’une logique mémorielle : une écharde de l’enfance fera saigner le bois vert de l’adolescence avant que cicatrise l’écorce des vieux jours. Des causes, des conséquences, schéma simple échappant au simplisme notamment dans ses développements riches des nuances d’un vécu.

Indices et interprétations

Ces nuances seront autant de clefs pour décrypter le récit. Il peut s’agir des ressentis, réflexions et réactions du narrateur face à ce à quoi il a été confronté au cours de son existence. Cela étoffe son discours en même temps que de fournir au lecteur des axes de compréhension du texte. Dans une autobiographie, ce qui n’est pas écrit est pourtant souvent dit. Quelques mots anodins parlent d’un autre chemin, celui qu’aurait aimé un jour peut-être prendre, la personne qui écrit bien qu’elle veuille s’en défendre… À l’auteur les indices, au lecteur les interprétations.

L’évolution comparée

Une évolution, voilà aussi ce que la chronologie permet d’exposer. À l’instar d’un héros romanesque, le personnage central d’une autobiographie gagnera en consistance s’il relate ce qui l’a transformé suite aux expériences vécues, aux épreuves traversées. L’identification du lecteur à l’univers de l’auteur s’effectuera alors par la comparaison : comment l’écrivain a-t-il négocié des périodes incontournables de la vie par rapport à la façon dont lui-même les a appréhendées ? Écrire une autobiographie, c’est un peu raconter un destin que notre lecteur aurait pu connaître…

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